Homologues
L'image qui donne sa miniature à cet article est issue d'une série de huit nouvelles peintures numériques réalisées au moyen d'un iPad que j'utilise depuis quelques mois en remplacement d'un vieux modèle de 2009, pleinement fonctionnel, mais complètement obsolète, avec lequel j'ai réalisé mes tout premiers essais de dessins et collages numériques.
Par comparaison avec une pratique traditionnelle fondée sur l'utilisation de supports et d'outils matériels — toile, pinceaux, liants, couleurs, etc. —, la peinture numérique présente bien des avantages, tant en termes de temps d'exécution — suppression de phases intermédiaires, le séchage, en particulier — qu'en termes d'économies de moyens — combien coûte un pot de 500 ml d'acrylique de bonne qualité ?
Dès lors qu’il s’agit de s’engager dans une recherche personnelle en s'efforçant de trouver des solutions harmoniques singulières, au plus près de ses ressentis, exigence qui définit à mes yeux la visée d'une certaine vérité esthétique, le temps consacré à la recherche de formes qui aient un sens pour soi est dévorant. On ne cherche pas dans tous les sens sans y laisser une part de soi.
L'an dernier, dans une vidéo consacrée à des assemblages réalisés à partir de pièces de carton peintes, j'ai évoqué cet aspect d'une pratique artistique en illustrant par des exemples la fonction qu'exerce l'élaboration de prototypes dans mes recherches et les contraintes qu'entraîne avec elle cette modalité de travail dans le champ de l'esthétique.
Ainsi, en peinture, dans l'expérience qui est la mienne et qui est donc très différente du travail qu'accomplit quotidiennement un peintre professionnel, cette recherche personnelle passe par des phases d'ajustements successifs assez coûteuses en termes de temps et d'efforts déployés.
Pour cette série à laquelle je travaille, par exemple, je me suis tout d'abord engagé dans une trentaine d’essais de collages numériques en m’efforçant, pour chaque essai, de susciter des effets de série.
Ci-dessous : trois collages numériques.
Puis, j'ai cherché à créer des surfaces en volume sur des supports physiques. Pour cela, j'ai disposé des morceaux de pâte à papier que j'ai collés sur des pièces de médium, pâte que j'ai peinte dans la foulée pour constater qu'au bout du compte l'effet obtenu précédemment au moyen d'une première série de peintures réalisées en aplats correspondait bien davantage au projet initial esquissé sur iPad.
Ci-dessus : une sélection de collages et de peintures numériques. Chaque pièce s’inscrit dans une série.
Si je disposais d’un plein-temps, peut-être mon approche de l'expérimentation serait-elle très différente. Sans doute aussi une certaine routine liée à des nécessités pratiques très concrètes — gagner de quoi vivre — s'imposerait-elle à moi. Comme ce n’est pas le cas et qu’il ne s’agit pas non plus de mon métier, l'outil numérique est d'un très grand soutien. Cela me permet, en particulier, outre les apports que je viens d'évoquer, de m'exercer indéfiniment à exécuter certains gestes que je m'applique ensuite à reproduire sur le support choisi, du médium de faible épaisseur dans le choix que j'ai fait. Même sur tablette, je m'astreins toutefois à observer une règle technique : je m'efforce en effet de faire comme si chaque geste accompli — ajouter, prolonger, étendre, réduire, etc. — ne pouvait pas être annulé, fonction de base de l'application que j'utilise sur iPad. Comme c'est la règle avec un support matériel, j'introduis ainsi un peu d'irréversible dans cet usage éthéré du pinceau, quitte à ce que, finalement, je me retrouve dans la nécessité d'avoir à effacer, à peindre par dessus, à corriger, etc.
Comme au mois d'août de l'an dernier, j’espère pouvoir profiter de cet été pour réaliser un compte-rendu vidéo très détaillé de cette nouvelle série que j'ai intitulée Homologues et qui est visible dans la section des ébauches du site.